Les engagés du sucre – l’engagisme à La Réunion 1828-1938


À voir jusqu’au 4 avril 2027
Horaires :
Du mardi au dimanche de 09h30 à 17h30
Visite incluse dans le prix d’entrée au musée : Plein tarif : 9€ / Tarif réduit : 6€
Ou visite de l’exposition uniquement : 5€
Gratuit pour les moins de 4 ans


INTRODUCTION

Au XIXe siècle, l’engagisme succède à l’esclavage dans les territoires dont le développement économique est fondé sur une main-d’oeuvre abondante et bon marché.

Ce système repose sur un contrat d’engagement de travail, à durée déterminée, entre un travailleur libre ou « engagé » et un employeur ou « engagiste ». On parle de salariat « contraint » ou « bridé » car l’engagé ne peut rompre, de lui-même, son contrat.

Transportés à travers les océans, ce sont une majorité d’hommes qui travaillent dans les plantations de canne à sucre, de cacao, de thé, d’ananas, de caoutchouc… dans les industries, dans les mines et dans la construction des infrastructures nécessaires au développement des empires coloniaux.

À La Réunion, au moins 164 000 étrangers arrivent des îles voisines, d’Afrique de l’Est, d’Inde, d’Extrême-Orient et du Pacifique pour soutenir l’essor sucrier et le développement de l’île. Contrôlés dès le départ et tout au long de leur séjour, ils sont soumis à de dures conditions de vie, victimes du non-respect de leur contrat.

Plusieurs milliers d’entre eux meurent ici. Certains font le choix de rentrer chez eux, comme prévu dans le contrat.

Ceux qui restent, par obligation ou par choix, enrichissent la société réunionnaise d’héritages multiples.

Engagés indiens nouvellement arrivés à La Réunion, 1863
Coll. Musée Stella Matutina

UNE HISTOIRE MÉCONNUE

Extraits de livrets d’engagés, 1880
Coll. Archives municipales de Bras-Panon

L’engagisme fait sens dans l’île pour la plupart de tous ceux, d’origine indienne, africaine, malgache, comorienne, rodriguaise, chinoise ou vietnamienne qui savent que leurs ancêtres ont été amenés comme « engagés » et non esclaves pour développer l’économie de l’île. Beaucoup d’entre eux ne gardent qu’une histoire de départs forcés voire d’enlèvements, de dur travail et de souffrances, ignorant que leurs actuelles pratiques sociales, culturelles et cultuelles, contrairement à celles des esclaves, ont perduré parce qu’elles étaient garanties par le contrat d’engagement. Mais les contours de l’histoire de l’engagisme pour le grand public restent encore flous voire souvent ignorés. Cette histoire est pourtant une composante essentielle dans la compréhension de la société réunionnaise actuelle, autant dans sa dimension historique que par ses apports économiques, sociaux et religieux. Depuis une vingtaine d’années, des cérémonies à « La Mémoire des Engagés », réunissent chaque 11 novembre, les descendants des engagés au Lazaret de La grande Chaloupe, lieu de débarquement et de quarantaine.

Mais pour une autre partie de la population réunionnaise, l’engagisme est juste un mot désignant une période de l’histoire de l’île et les engagés « Malbars », « Cafres » etc, des gens qui ont eu « la chance » de fuir la pauvreté de leurs régions d’origine, même si nombre de leurs descendants sont encore, aujourd’hui, peu insérés économiquement et craints à cause de leurs pratiques religieuses, non chrétiennes, considérées comme de la sorcellerie. En France hexagonale, l’engagisme reste une grande inconnue. Même les archivistes, à l’exception de ceux ayant fait carrière dans les territoires de La Réunion ou des îles des Antilles ignorent cette part de l’histoire de France. Récemment, un journaliste parisien préparant un reportage sur le sujet, souhaitait « faire très simple » car le sujet était moins connu que celui de l’esclavage.

Exposer l’histoire de l’engagisme au musée de Stella Matutina c’est dresser un état des lieux des connaissances sur le sujet, faire oeuvre de pédagogie sur un thème devenu plus présent dans le débat public. C’est aussi ancrer ce lieu dans une histoire locale, régionale et mondiale.

HÉRITAGES

À La Réunion, le contrôle et l’exploitation de la main-d’oeuvre mis en place pendant la période de l’esclavage et de l’engagisme marquent le monde du travail. Ils entraînent des rapports de soumission et de domination. Beaucoup de descendants d’engagés comparent les conditions de vie de leurs ancêtres à celles des esclaves. Pour tous, « le sang des engagés a nourri le sol de l’île ».

Pourtant, l’engagisme diffère de l’esclavage en ce que les individus ont gardé leurs noms, leurs traditions culturelles, leurs rituels religieux et pour certains des liens avec les régions d’origine.
Les puissants « cultes des ancêtres » et la présence permanente des « esprits », qui caractérisent la vie des Réunionnais même chrétiens, en est le plus profond héritage.

Aujourd’hui, beaucoup de descendants se rendent dans les régions d’où sont partis les engagés. Ils en reviennent riches de découvertes qui irriguent la culture réunionnaise contemporaine.

Legacy de Migline Paroumanou, 2017
Biscuits de porcelaine émaillée. Coll. Région Réunion

EXPOSITION D’INTÉRÊT NATIONAL

L’exposition Les engagés du sucre a reçu le label « Exposition d’intérêt national 2025 » par le ministère de la Culture.

Le label « Exposition d’intérêt national » a été créé par le ministère de la Culture en 1999 pour mettre en valeur et soutenir des expositions remarquables organisées par les musées de France dans les différentes régions. Elles mettent en lumière des thématiques qui reflètent la richesse et la diversité des collections des musées de France.
Ces « Expositions d’intérêt national » s’inscrivent dans le cadre de la politique de démocratisation culturelle menée par le ministère de la Culture. Sur l’ensemble du territoire, ce label récompense un discours muséal innovant, une approche thématique inédite, une scénographie et un dispositif de médiation ayant pour objectif de toucher les publics les plus variés, tout particulièrement dans le cadre de l’éducation artistique et culturelle.


CONCEPTION DE L’EXPOSITION

Commissaires de l’exposition : Michèle Marimoutou, Agrégée, Docteure en Histoire, chercheuse associée au Centre de recherches en histoire internationale et atlantique (Nantes)
Bernard Leveneur, Conservateur en chef du patrimoine, Directeur du Musée de Stella Matutina de janvier 2023 à juillet 2025.

Scénographie et designer graphique : Kamboo design

Conception et réalisation des audiovisuels : – Maëva Thurel et Ulric Jacquot,
Antonio Prianon et Annecy Bonnefond, SPL RMR/Direction du Développement et des publics,
Laurent Pantaléon et Stéphane Boquet.

Illustrations : Denis Vergne

Décor et impressions numériques : Labopix